Climat : «La production des bourgeons et la migration des oiseaux sont déjà bouleversées»
Par Aude Massiot — 9 décembre 2019 à 05:59
Vol d'oiseaux migrateurs en Allemagne. Photo Getty Images
A l'occasion de la COP25 sur le climat, «Libération» publie une série d'interviews sur les liens entre préservation de la biodiversité et lutte contre le dérèglement climatique.
Climat : «La production des bourgeons et la migration des oiseaux sont déjà bouleversées»
Pour la première fois, les scientifiques internationaux spécialistes du climat (Giec) et de l'étude de la biodiversité (IPBES) publieront un rapport commun l'an prochain pour démontrer à quel point ces deux sujets sont interconnectés. Ce texte alimentera, fin 2020, la COP15 de l'ONU sur la biodiversité, organisée en Chine, qui doit voir la conclusion d'un accord mondial, sur le modèle de celui de Paris sur le climat.
Coauteur de la première évaluation mondiale de l’état de la biodiversité, publiée en mai par l’IPBES et qui soulignait que plus de 40% des espèces d’amphibiens, plus d’un tiers des récifs coralliens et des mammifères marins sont menacés, Paul Leadley, chercheur à l’université Paris-Sud, explique les interactions entre les espèces vivantes et le dérèglement climatique.
Quelles sont les principales conséquences du changement du climat sur la biodiversité ?
Le principal effet observé actuellement est le déplacement de nombreuses espèces vers les Pôles et plus haut en altitude, pour rechercher des températures plus supportables. Un exemple frappant est la chenille processionnaire, en France. La limite Nord de son aire de répartition était, jusque dans les années 70, au niveau d'Orléans. Maintenant on la retrouve dans la région parisienne. Elle a donc avancé d'une centaine de kilomètres en seulement quelques décennies et nous sommes convaincus que ce déplacement est lié aux hivers de plus en plus doux. Plus largement, on s’attend à ce que l’ensemble des aires de répartition des espèces vivantes, sur terre ou sur mer, se déplacent.
Dans la mer du Nord, les poissons typiques de la partie sud commencent à coloniser les zones les plus arctiques. La production des bourgeons et la migration des oiseaux, des activités naturelles qui dépendent du climat, sont déjà bouleversées.
Si certaines espèces ne peuvent pas bouger, ni s’adapter à l'évolution du climat, elles disparaîtront à l’échelle locale, d'abord sur les parties les plus proches de l'Equateur de leur lieu de vie. Les récifs coralliens, par exemple, ne peuvent pas se déplacer et subissent déjà une forte mortalité à cause des épisodes de canicules marines. A +2°C par rapport à l'époque préindustrielle, 5% des espèces seront en état de risque d’extinction. A un peu plus de 4°C, ce taux monte à 15% à l’échelle mondiale, avec un niveau d’incertitude très élevé.
A lire aussiLa biodiversité française sous pression
Les arbres sont-ils aussi touchés ?
Dans les forêts, on observe déjà le dépérissement de certaines espèces à cause du réchauffement. Cela, partout dans le monde. C’est très inquiétant, car les arbres représentent un stock extrêmemement important de carbone, capturé de l’atmosphère, ainsi qu’une source de revenus vitale pour certaines populations.
En France, le pin sylvestre est une des espèces les plus touchées. Il dépérit dans la partie sud de son aire de vie, mais ne se porte pas bien non plus dans la forêt de Fontainebleau, en région parisienne. Le problème des arbres est qu’ils ne se déplacent pas assez vite pour s’adapter à la hausse des températures mondiales.
Autre phénomène, dans les très grandes forêts de conifères dans le nord-ouest des Etats-Unis et le sud-ouest du Canada, un petit insecte, appelé dendroctone du pin ponderosa, ronge les arbres et les tue. Avant, il ne montait jamais à ces latitudes.
A lire aussiLa disparition des insectes se confirme
Existent-ils des solutions qui permettent à la fois de préserver la biodiversité et de limiter l'emballement climatique ?
Bien sûr. Par exemple, arrêter de détruire les forêts en Indonésie, pour l'huile de palme, ou au Brésil pour l'élevage, permettrait de préserver des écosystèmes à très haute valeur naturelle et de garder des quantités énormes de carbone dans les arbres et les sols. En plus de cela, il faut restaurer ce qu’on a dégradé ou détruit. La reforestation peut permettre un stockage de carbone très important. Mais il est vital que cette restauration soit faite dans le respect de la biodiversité, et non pas en replantant des monocultures d'arbres ou des espèces qui ne sont pas locales.
A lire aussiLes réserves naturelles, un havre pour les oiseaux communs
Certains présentent l'afforestation, c'est-à-dire créer une forêt où il n’y en avait pas avant, comme une solution. Il faut faire attention, cette pratique peut avoir des effets très néfastes sur la biodiversité, comme on l'observe dans les projets d'afforestation des savanes. Ou, par exemple, en Chine, où les autorités ont planté des forêts de peupliers dans les régions désertiques du nord du pays. Seulement, ces arbres pompent énormément d’eau dans les nappes phréatiques, alors que c'est une ressource rare dans ces régions.
D'autres solutions sont à trouver dans les systèmes agricoles. Il est bénéfique, par exemple, d'augmenter dans une certaine mesure les apports organiques des sols, avec du lisier, car cela leur permet de garder plus de carbone et nourrit la biodiversité. En parallèle, il faut réduire les apports d’engrais azotés sous forme minérale, car ils sont une source de pollution des écosystèmes et d'émissions de gaz à effet de serre
Bernaches cravant en hivernage sur le Bassin d’Arcachon. On en compte 50 000.©E. Joly
LA GESTION ADAPTATIVE : UN PIÈGE ?
Chasse
3 octobre 2019
La Fédération nationale des chasseurs comptait beaucoup sur la collaboration entre scientifiques et chasseurs prévue par la récente loi chasse pour déterminer quels oiseaux peuvent être considérés comme gibier et établir éventuellement des quotas. C’est mal parti…
La nouvelle, tombée au coeur de l’été, a provoqué un choc dans les rangs des sauvaginiers : le Conseil d’État a suspendu un arrêté ministériel autorisant la chasse au courlis cendré. La haute juridiction administrative avait été saisie par la Ligue de protection des oiseaux (LPO) suite à l’arrêté pris par la ministre de la Transition écologique, Élisabeth Borne, et daté du 31 juillet 2019. Ce texte autorisait la chasse de 6 000 courlis cendrés à partir du 3 août sur la façade maritime de l’Atlantique, de la Manche et de la mer du Nord, puis à partir du 15 septembre partout ailleurs.
La concertation avec les scientifiques semblait avoir fonctionné et les chasseurs s’en réjouissaient.
Patatras ! « Encore une fois, l’Europe et le Conseil d’État ne voient pas plus loin que le bout de leur nez, ne parlant que de la chasse comme variable d’ajustement », s’est indignée dans un communiqué la Fédération nationale des chasseurs (FNC), qui demande « la suspension immédiate des négociations autour de la gestion adaptative tant que des bases saines n’auront pas été trouvées ». Un autre arrêté concernant cette fois la chasse aux oies sauvages avait également été suspendu en début d’année par le Conseil d’État. Dans un commentaire sur la récente loi chasse (voir le Betteravier français du 16 juillet) nous avions émis des doutes sur cette fameuse gestion adaptative. En effet, dès le départ les dés sont pipés. Contrairement à ce qui se passe aux États-Unis ou au Canada où les scientifiques travaillent main dans la main avec les chasseurs, en Europe un mur de méfiance sépare les uns des autres. Pour une association comme la LPO, travailler avec des chasseurs n’est pas raisonnable quels que soient les efforts déployés par ces derniers pour préserver l’environnement. On est « protecteur » ou on est « chasseur ». Il faut bien dire que l’opinion n’est pas favorable aux seconds et qu’elle se rallie assez massivement aux premiers ce qui leur donne des ailes. Cette attitude est néanmoins curieuse. Quand les Québécois, qui gèrent parfaitement leur faune, passent à 20 oies blanches par jour et par chasseur leur quota de prélèvement, personne ne bronche. Chez nous, obtenir l’autorisation de chasser l’oie cendrée quinze jours de plus en février provoque un tollé alors que l’espèce se porte très bien.
Nous avons actuellement 50 000 bernaches cravant en hivernage sur le Bassin d’Arcachon ce qui est considérable et peut menacer les zostères qui sont les herbes marines dont elles se nourrissent. Protégée depuis plus de trente ans à une époque où l’espèce déclinait l’oie s’est refait une belle santé. Au Québec ou au Canada aucun problème : elle sort de la protection. Pas en Europe. Quand on entre « en protection », pas question d’en sortir.
Dans ce contexte la Fédération nationale des chasseurs s’est montrée pour le moins candide. Imaginer que tout allait changer et que l’on allait pouvoir travailler avec les adversaires d’hier, en bons camarades, relève de l’utopie.
Veto systématique
On dira « mais le courlis cendré est classé vulnérable » par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Sans doute. Mais il faut savoir que cet organisme ratisse (très) large et que ses comptages sont aléatoires. Ce sont en vérité des estimations qui ne tiennent pas compte des situations particulières. Ensuite la FNC avait aussi mis sur la table une étude scientifique de qualité. Enfin et tous les vrais écologistes le savent ce n’est pas la chasse qui représente un danger pour une espèce mais l’évolution du milieu. Dans ces conditions le prélèvement autorisé par la ministre de la transaction écologique restait tout à fait compatible avec la population concernée.
On pourrait adhérer à la position de la LPO si, dans certains cas, elle se montrait ouverte aux discussions, si elle admettait, par exemple, le prolongement de la chasse aux oies cendrées ou un quota de bernaches cravant. Mais à partir du moment où elle met un veto systématique comment croire encore à un désir de collaboration objectif ? Dans ce contexte la FNC, visiblement écoeurée, a claqué la porte de la fameuse « gestion adaptative ».
Reste une question lancinante : et maintenant que fait-on ?
ÉRIC JOLY
Je n'aurais pas dit mieux. Une espèce mise en moratoire est une espèce définitivement perdue
Dernière modification de coinc59, 13/12/2019 à 23h30
Super cet article, il reflète bien ce qui se passe et la position dogmatique de la Lpo. Son manque d'objectivité devrait être pris en compte. Et maintenant que fait on ? Effectivement....
Juste pour mémoire, petite envie de parler des pseudo scientifiques.....
A la fin des années 80 les "scientifiques" du climat disaient déjà, dans les prochaines années, si l'on ne fait rien, le sud de la France deviendra ou ressemblera au Sahel...........
J'avais commencé a mesurer la pluviométrie en 88, depuis je sais avec certitude que ceux qui avaient prétendue ce phénomène se sont foutu le doigt dans l’œil profondément.
Surement dirigés..........
Tout est comme ça, foutaise et compagnie.
Super ???
Je n'en fais pas la même lecture du tout.
Arrêtons de critiquer nos adversaires aussi sournois soient ils...
On a quoi comme données ???
L isnea Fleuron de la fnc , qu'a t elle produit en 7/8 ans ?
Cherchez pas rien du tout...
Je crois par contre la maudite plume quand elle dit que Schraen est arrivé la fleur au fusil pour les négociations avec un dossier introuvable ( sans doute pensait il que son appuie politico cynégétique suffirait )
Question . Pourquoi ne nous montre il pas son dossier si étayé d'après ses dires ...
Posez vous la bonne question...
Sommes nous défendu ?
Dans la vie il faut être têtu mais aussi écouter les autres.
A mon avis il n'y aura rien avant 2021 pour les oies, au mieux. Surtout avec l'accident cérébral de M. Boos.
Le "et maintenant, que fait-on?" C'est la bonne question
Dernière modification de coinc59, 15/12/2019 à 13h43
Souvenons-npous d'un certain 14 février où nous étions quelques 200.000 chasseurs à manifester à Paris.
Les black-blocks se tiendraient très discrets devant notre détermination et notre cohésion qui a fait pâlir Mme Voynet.. que nous avons a..voiné.
Personnellement je pense que si manifestation il y a, elle devrait rassembler beaucoup d'acteurs de la ruralité qui en ont marre qu'on dénigre leur façon de vivre
Et pour les oies, la dérogation je n'y crois pas, à partir du moment où le conseil d'état juge qu'il y a peut être d'autres moyens meilleurs que la chasse pour réguler une population, (gazage ou stérilisation) c'est peine perdue. C'est triste.... Mais pour un juriste rien d'abberant, alors que pour nous....
Modifier cette vieille directive mais bon ça sera difficile.
Après on ferait mieux de recruter de bons juristes au final.
je viens de recevoir un @ pour laisser un avis favorable à la gestion adaptative
alors bonne question , que fait on ???????????????????
Haaaaaaaaaaaaaaaa par contre , les cons eux sont pas en régression , preuve en est ,
que nous sommes cernés .
"Dans ce contexte-là FNC, visiblement écoeurée, a claqué la porte de la fameuse « gestion adaptative »."
Je pense que c'est une très mauvaise idée la politique de la chaise vide n'est jamais bonne, on laisse le soin à des autres de prendre des décisions qui nous impacterons.
"Reste une question lancinante : et maintenant que fait-on ?"
J'avais cru comprendre que Macron était un ardent défenseur de la chasse, j'aurais mal compris ou alors juste qu'il avait besoin des voies des chasseurs pour l'Européen .
Mr Coste est un pot à Emmanuel, faudrait peut-être qu'il justifie de ces honoraires de lobbyiste.
Mais ne rêvons pas trop aux vues des résultats aux Européens, Macron aura besoin des voies des écolos bobo pour les municipales.
La mise en place de la chasse adaptative se fera, mais surement pas sur les bases que la FNC avaient imaginées.
Rien ne sert de courir suffit de partir à point
FIST FUCKER MILICE SPIRIT - VICE PRESIDENT
Y'a rien, Ché du brun!!
Dans ton étude , la LPO oublie les chats harets, chats de la nature redevenus sauvages, qui, eux prélèveraient environ 68 oiseaux/an;
Comme ils seraient, d'après leurs études environ 8 millions, faites le lien.....
Environ 560millions d'oiseaux disparus, chez nous, en France, plus petits lapereaux etc, etc.........
Avec tout ça, "chat" va bien.....